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fabriquées avec du miel et de la farine de froment. Un de ces visiteurs nous offrit une longue aiguille en argent, terminée en crochet, et nous invita à pêcher dans son vase. D’abord nous voulûmes nous excuser, en objectant que nous n’étions pas dans l’habitude de prendre de la nourriture pendant la nuit ; mais on nous fit des instances si engageantes, on nous tira la langue de si bonne grâce, qu’il fallut bien se résigner au Louk-So. Nous piquâmes chacun une boulette, que nous écrasâmes d’abord entre les dents pour en étudier la saveur ... Nous nous regardâmes en faisant la grimace ; cependant les convenances étaient là, et nous dûmes l’avaler par politesse. Si encore nous en avions été quittes pour ce premier acte de dévouement ! Mais le Louk-So était inexorable ; les nombreux amis que nous avions à Lha-Ssa se succédèrent presque sans interruption, et force nous fut de croquer jusqu’au jour des dragées thibétaines.

Le second Louk-So consiste encore à faire des visites, mais avec un nouveau cérémonial. Aussitôt que l’aube paraît, les Thibétains parcourent les rues de la ville, portant d’une main, un pot de thé beurré, et de l’autre, un large plat doré et vernissé, rempli de farine de tsamba amoncelée en pyramide, et surmontée de trois épis d’orge ; en pareil jour, il n’est pas permis de faire des visites sans avoir avec soi du tsamba et du thé beurré. Dès qu’on est entré dans la maison de ceux à qui on veut souhaiter la bonne année, on commence avant tout par se prosterner trois fois devant l’autel domestique, qui est solennellement paré et illuminé ; ensuite, après avoir brûlé quelques feuilles de cèdre, ou d’autres arbres aromatiques, dans une grande cassolette