Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 2.djvu/360

Cette page n’a pas encore été corrigée

véritable Dieu, et de les instruire des moyens de sauver leurs âmes ? — Oui, je vous l'ai déjà dit, je crois que vous êtes des gens honnêtes ; mais enfin la religion que vous prêchez a été déclarée mauvaise, et a été prohibée par notre grand Empereur. — Aux paroles que tu viens de prononcer nous n'avons à répondre que ceci : c'est que la religion du Seigneur du ciel n'a jamais eu besoin de la sanction de ton Empereur, pour être une religion sainte ; pas plus que nous de sa mission, pour la venir prêcher dans le Thibet. — L'ambassadeur chinois ne jugea pas à propos de continuer cette discussion ; il nous congédia sèchement, en nous déclarant que nous pouvions nous tenir assurés qu'il nous ferait partir du Thibet.

Nous nous hâtâmes de nous rendre chez le Régent, et de lui faire part de la déplorable entrevue que nous avions eue avec Ki-Chan. Le premier Kalon avait eu connaissance des projets de persécution que les Mandarins chinois tramaient contre nous. Il tâcha de nous rassurer, et nous dit que, protégeant dans le pays des milliers d'étrangers, il serait assez fort pour nous y faire jouir d'une protection que le gouvernement thibétain accordait à tout le monde. — Au reste, ajouta-t-il, lors même que nos lois interdiraient aux étrangers l'entrée de notre pays, ces lois ne pourraient vous atteindre. Les religieux, les hommes de prières étant de tous les pays, ne sont étrangers nulle part : telle est la doctrine qui est enseignée dans nos saints livres. Il est écrit : La chèvre jaune est sans patrie, et le Lama n'a pas de famille. .... Lha-Ssa étant le rendez-vous et le séjour spécial des hommes de prières, ce seul titre devrait toujours vous y faire trouver liberté et protection.