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village repoussant et hideux au-delà de toute expression. Il est composé de quelques misérables habitations ; grossièrement construites en terre noire ; toutes servent d'auberge. Les provisions y sont plus rares encore qu'aux Eaux toujours coulantes, et par conséquent d'une cherté plus grande. On doit également tout faire venir de Tchong-Weï ; car le pays ne fournit rien, pas même de l’eau. On a eu beau creuser des puits à la plus grande profondeur, on n'a jamais trouvé qu'un terrain sec et rocailleux. Les habitants de Kao-Tan-Dze sont obligés d'aller chercher l'eau à une distance de soixante lis (six lieues). Aussi la font-ils payer cher aux voyageurs qui ont à passer par là. Un seau d'eau coûte cinquante sapèques. Si nous eussions voulu complètement désaltérer nos chameaux, il nous eût fallu dépenser beaucoup de cinquantaines de sapèques. Nous nous contentâmes de faire une provision pour nous et les chevaux. Quant aux chameaux, ils durent attendre des jours meilleurs et une terre moins inhospitalière. Kao-Tan-Dze, ce pays si misérable et si affreux, n'a pas même l'avantage de jouir de la tranquillité que sa pauvreté et sa solitude sembleraient pourtant devoir lui assurer. Il est continuellement désolé par les brigands. Aussi toutes les habitations portent-elles quelques traces d'incendie et de dévastation. Quand nous nous présentâmes à l'auberge, on nous demanda si nous voulions défendre nos animaux contre les brigands. Cette question nous jeta dans un grand étonnement, et nous nous hâtâmes de provoquer de nouvelles explications sur une chose qui nous paraissait bien étrange. On ajouta qu'à Kao-Tan-Dze, il y avait des auberges de deux espèces : des auberges où on