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d'eau montaient et retombaient avec intermittence, comme si elles eussent été poussées par un immense corps de pompe. Au-dessus de ces sources, des vapeurs épaisses s'élevaient continuellement dans les airs, et se condensaient en nuages blanchâtres. Toutes ces eaux étaient sulfureuses. Après avoir longtemps bondi et rebondi dans leurs vastes réservoirs de granit, elles abandonnaient enfin ces rochers, qui semblaient vouloir les retenir captives, et allaient se réunir dans une petite vallée où elles formaient un large ruisseau qui s'écoulait sur un lit de cailloux jaunes comme de l'or. Ces eaux bouillantes ne conservaient pas longtemps leur fluidité. L'extrême rigueur de l'atmosphère les refroidissait si rapidement, qu'à une demi-lieue loin de sa source, le ruisseau était presque entièrement glacé. On rencontre fréquemment, dans les montagnes du Thibet, des sources d'eaux thermales. Les Lamas médecins reconnaissent qu'elles ont de grandes propriétés médicales ; ils en prescrivent volontiers l'usage à leurs malades, soit en bains, soit en boisson.

Depuis les monts Tant-La jusqu'à Lha-Ssa, on remarque que le sol va toujours en inclinant. A mesure qu'on descend, l'intensité du froid diminue, et la terre se recouvre d'herbes plus vigoureuses et d'une plus grande variété. Un jour, nous campâmes dans une vaste plaine, où les pâturages étaient d'une merveilleuse abondance. Comme nos animaux souffraient depuis longtemps d'une affreuse famine, on décida qu'on les ferait profiter de l'occasion, et qu'on s'arrêterait pendant deux jours.

Le lendemain matin, au moment où nous faisions tranquillement bouillir le thé dans l'intérieur de notre tente,