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s'en servent pour faciliter la fusion des métaux. Nous nous arrêtâmes pendant deux jours dans le pays des Tsaïdam. On fit bombance avec du tsamba et quelques chèvres, quo les bergers nous troquèrent contre du thé en brique. Les bœufs à long poil et les chameaux se régalèrent avec du nitre et du sel qu'ils trouvaient partout à fleur de terre. La caravane tout entière chercha à ramasser le plus de force possible pour franchir le Bourhan-Bota, montagne fameuse par les vapeurs pestilentielles dont elle est, dit-on, continuellement enveloppée.

Nous nous mîmes en marche à trois heures du matin, et après beaucoup de circuits et de détours dans cette contrée montueuse, nous arrivâmes à neuf heures au pied du Bourhan-Bota. La caravane s'arrêta un instant, comme pour consulter ses forces ; on mesurait de l'œil les sentiers abruptes et escarpés de cette haute montagne ; on se montrait avec anxiété un gaz subtil et léger, qu'on nommait vapeur pestilentielle, et tout le monde paraissait abattu et découragé. Après avoir pris les mesures hygiéniques enseignées par la tradition, et qui consistent à croquer deux ou trois gousses d'ail, on commence enfin à grimper sur les flancs de la montagne. Bientôt, les chevaux se refusent à porter leurs cavaliers, et chacun avance à pied et à petits pas ; insensiblement, tous les visages blêmissent, on sent le cœur s'affadir, et les jambes ne peuvent plus fonctionner ; on se couche par terre, puis on se relève pour faire encore quelques pas ; on se couche de nouveau, et c'est de cette façon déplorable qu'on gravit ce fameux Bourhan-Bola. Mon Dieu, quelle misère ! on sent ses forces brisées, la tête tourne, tous les membres semblent se disjoindre, on é