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citâmes l'exemple de saint Paul, qui n'avait pas cru déroger à sa dignité en travaillant de ses mains, pour n'être point à charge aux fidèles. Aussitôt que Samdadchiemba eut appris que saint Paul avait été en même temps corroyeur et apôtre, il abdiqua, sur-le-champ, sa paresse et son amour-propre, et se mit à travailler avec ardeur le poil de chameau. Quel ne fut pas notre étonnement, quand nous le vîmes à l'œuvre ! Ce gaillard-là était un passementier très-distingué, et il ne nous l'avait jamais dit. Il choisit le poil le plus fin, et tissa pour nos chevaux des brides et des licous, où il y avait réellement beaucoup de savoir-faire. Il va sans dire qu'il fut mis de droit à la tête de notre entreprise, et qu'il prit la direction générale de la fabrique des cordes.

La belle saison amena à Tchogortan un grand nombre de promeneurs de la grande lamaserie de Kounboum ; ils venaient prendre l'air de la campagne, et se reposer un peu de leurs études journalières. Notre chambre devint, pour lors, comme un lieu de pèlerinage ; car personne n'aurait voulu se dispenser, en venant se promener à Tchogortan, de rendre visite aux Lamas du ciel d'occident. Ceux que nous avions connus d'une manière plus particulière, et qui avaient commencé à s'instruire des vérités de la religion chrétienne, étaient attirés vers nous par un autre motif que la curiosité ; ils désiraient avant tout s'entretenir de la sainte doctrine de Jéhovah, et nous demander des éclaircissements sur les difficultés qui leur étaient survenues. O ! comme notre cœur était pénétré d'une joie ineffable, quand nous entendions ces religieux bouddhistes, prononcer avec respect les saints noms de Jésus et de Marie, et