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ne bougea ; on crut que l'impératrice voulait se donner encore un sujet de divertissement. Les Tartares, ajoute-t-on, entrèrent dans Péking, et la famille impériale fut massacrée.

La paix profonde dont jouit la Chine depuis si longtemps, a beaucoup diminué l'importance de ces corps-de-garde ; quand ils menacent ruine, rarement on les restaure ; le plus souvent, les portes et les fenêtres sont enlevées, et personne n'y habite. Sur certaines routes très-fréquentées, on répare seulement avec assez d'assiduité les écriteaux et les cinq bornes.

Le corps-de-garde où nous nous étions arrêtés était désert. Après avoir attaché nos animaux à un gros poteau, nous entrâmes dans une chambre, et nous prîmes en paix une salutaire réfection. Les voyageurs nous regardaient en passant, et paraissaient un peu surpris de voir leur espèce de guérite transformée en restaurant. Les élégants surtout ne manquaient pas de sourire, à la vue de ces trois Mongols si peu au fait de la civilisation.

Notre halte ne fut pas longue. L'écriteau nous annonçait officiellement que nous avions encore quarante-cinq lis de marche avant d'arriver à Ning-Hia ; vu la difficulté de la route et la lenteur de nos chameaux, nous n'avions pas de temps à perdre. Nous partîmes en longeant un magnifique canal, alimenté par les eaux du fleuve Jaune, et destiné aux irrigations de la campagne. Pendant que la petite caravane cheminait à pas lents sur un terrain humide et glissant, nous vîmes venir vers nous une nombreuse troupe de cavaliers. A mesure que le cortège avançait, les innombrables travailleurs qui réparaient les bords du canal, se prosternaient contre terre et s'écriaient : —