Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/420

Cette page n’a pas encore été corrigée

Yang, qui termina cette guerre. Le vainqueur du Khachghar est un Mandarin militaire de la province du Chang-Tong, remarquable par sa haute taille, et surtout par la prodigieuse longueur de sa barbe. D'après ce qu'on nous en a dit, sa manière de combattre était assez singulière ; aussitôt que l'action s'engageait, il faisait deux grands nœuds à sa barbe pour n'en être pas embarrassé, puis il se portait sur l'arrière de ses troupes. Là, armé d'un long sabre, il poussait ses soldats au combat, et massacrait impitoyablement ceux qui avaient la lâcheté de reculer. Cette façon de commander une armée paraîtra bien bizarre ; mais ceux qui ont vécu parmi les Chinois y verront que le génie militaire de Yang était basé sur la connaissance de ses soldats.

Les Musulmans furent défaits, et on s'empara par trahison de Tchankoeul. Il fut envoyé à Péking, où il eut à endurer les traitements les plus barbares et les plus humiliants, jusqu'à être donné en spectacle au public, enfermé dans une cage en fer, comme une bête fauve. L'Empereur Tao-Kouang voulut voir ce guerrier dont la renommée était si grande, et ordonna qu'on le lui amenât. Les Mandarins prirent aussitôt l'alarme : ils craignirent que le prisonnier ne révélât à l'Empereur les causes qui avaient suscité la révolte du Khachghar, et les affreux massacres qui en avaient été la suite. Les grands dignitaires comprirent que ces révélations pourraient leur être funestes, et les rendre coupables de [négligence aux yeux de l'Empereur, pour n'avoir pas surveillé les Mandarins envoyés dans les pays étrangers. Pour obvier à ce danger, ils firent avaler à l'infortuné Tchankoeul un breuvage qui lui ôta la