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venu saint Louis par des offres de service. Ce fait ne paraissait tenir à rien, et le récit en devait sembler paradoxal. Le même scepticisme serait déraisonnable, quand on voit que les Mongols n'ont fait autre chose pendant cinquante années, et quand on est assuré, par la lecture des écrits des contemporains, et par l'inspection des monuments originaux, que cette conduite était naturelle de leur part, qu'elle entrait dans leurs vues, qu'elle était conforme à leurs intérêts, et qu'elle s'explique enfin par les règles communes de la raison et de la politique.

» La série des événements qui se rattachent à ces négociations sert à compléter l'histoire des croisades ; mais la part qu'elles ont pu avoir dans la grande révolution morale qui ne tarda pas à s'opérer, les rapports qu'elles firent naître entre des peuples jusqu'alors inconnus les uns aux autres, sont des faits d'une importance plus générale et plus digne encore de fixer notre attention. Deux systèmes de civilisation s'étaient établis, étendus, perfectionnés, aux deux extrémités de l'ancien continent, par l'effet de causes indépendantes, sans communication, par conséquent sans influence mutuelle. Tout à coup les événements de la guerre et les combinaisons de la politique, mettent en contact ces deux grands corps, si longtemps étrangers l'un à l'autre. Les entrevues solennelles des ambassadeurs ne sont pas les seules occasions où il y eut entre eux des rapprochements ; d'autres plus obscures, mais encore plus efficaces, s'établirent par des ramifications inaperçues, mais innombrables, par les voyages d'une foule de particuliers, entraînés aux deux bouts du monde, dans des vues commerciales, à la suite des envoyé