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Notre embarras devenait sérieux ; nous commencions à craindre pour nos animaux, qui étaient attachés à l'entour de la tente, et un peu aussi pour nous-mêmes. Comme le bruit ne discontinuait pas, et paraissait, au contraire, se rapprocher sans cesse, nous nous levâmes, non pas pour aller examiner de près cette bête malencontreuse qui troublait notre repos, mais pour tâcher de lui donner l'épouvante. Tous trois à la fois, nous nous mîmes à pousser de grands cris, de toute la puissance de nos poumons. Après un instant de silence, les mugissements se firent de nouveau entendre, mais à une distance très-éloignée, Nous conjecturâmes qu'à notre tour, nous avions fait peur à l'animal, et cela diminua un peu notre crainte.

Ces cris effrayants venant à se rapprocher encore, nous allumâmes, à quelques pas de notre tente, un grand entassement de broussailles. Ce grand feu, au lieu d'éloigner cet animal problématique, parut au contraire l'inviter à venir vers nous. Une flamme immense s'échappait du sein des broussailles embrasées. A la faveur de son lointain reflet, nous distinguâmes enfin comme la forme d'un grand quadrupède de couleur rousse. Il ne paraissait pas avoir l'air aussi féroce, que ses cris semblaient l'annoncer. Nous nous hasardâmes à aller vers lui, mais il s'éloignait à mesure que nous avancions. Samdadchiemba, dont les yeux étaient très-perçants, et accoutumés, comme il le disait, à regarder dans le désert, nous assura que c'était un chien ou un veau égaré.

Nos animaux paraissaient, pour le moins, aussi préoccupés que nous. Le cheval et le mulet dressaient leurs oreilles en avant, et creusaient la terre de leur pied, tandis que