Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/205

Cette page n’a pas encore été corrigée

accessibles : la Chine, la Mantchourie, les Khalkhas, les divers royaumes de la Mongolie méridionale, les Ouriang-hai, le Koukou-Noor, le nord et le midi des montagnes célestes, le Thibet, l'Inde et quelquefois même le Turkestan. Il n'y a pas de fleuve qu'ils n'aient traversé, de montagnes qu'ils n'aient gravies, de grand Lama devant qui ils ne se soient prosternés, de peuple chez lequel ils n'aient vécu, et dont ils ne connaissent les mœurs, les usages et la langue. Au milieu de leurs courses vagabondes, le péril de perdre le chemin et de s'égarer dans les déserts n'existe jamais pour eux. Voyageant sans but, les endroits où ils arrivent sont toujours ceux où ils voulaient aller. La légende du Juif-errant, qui marche et marche toujours, est exactement réalisée dans la personne de ces Lamas. On dirait qu'ils sont sous l'influence d'une puissance secrète, qui les fait incessamment aller de place en place. Dieu semble avoir mêlé au sang qui coule dans leurs veines, quelque chose de cette force motrice qui pousse les mondes chacun dans leur route, sans jamais leur permettre de s'arrêter.

Les Lamas vivant en communauté sont ceux qui composent la troisième classe. On appelle lamaserie une réunion de petites maisons bâties tout à l'entour d'un ou de plusieurs temples bouddhiques ; ces habitations sont plus ou moins grandes, plus ou moins belles, suivant les facultés de ceux qui en sont les propriétaires. Les Lamas qui vivent ainsi en communauté, sont ordinairement plus réguliers que les autres ; ils sont plus assidus à la prière et à l'étude. Il leur est permis de nourrir chez eux quelques bestiaux ; des vaches pour leur donner le lait et le beurre,