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plus que le prince de quelques tribus nomades, méprisées des Chinois, objet de leurs sarcasmes et dé leurs moqueries, mais redoutées par la cour de Péking, à cause de la terrible influence qu'elles pourraient exercer sur les destinées de l'empire. Il ne fut permis qu'à une moitié de la suite de passer la frontière ; tout le reste fut forcé de camper au nord de la grande muraille, dans les plaines du Tchakar.

Le Guison-Tamba séjourna à Péking pendant trois mois, voyant l'Empereur de temps en temps, et recevant les adorations un peu suspectes des princes Mantchous et des grands dignitaires de l'empire. Enfin il délivra le gouvernement chinois de sa présence importune ; et après avoir visité les lamaseries des Cinq-Tours et de la Ville-Bleue, il reprit la route de ses Etats ; mais il ne lui fut pas donné d'y arriver : il mourut en chemin, victime, disent les Mongols, de la barbarie de l'Empereur, qui lui fit administrer à Péking un poison lent. Cette mort a ulcéré les Tartares Khalkhas, sans trop les consterner ; car ils sont persuadés que leur Guison-Tamba ne meurt jamais réellement. Il ne fait que transmigrer dans un autre pays, pour revenir ensuite plus jeune, plus frais et plus dispos. En i844, ils ont appris en effet que leur Bouddha vivant s'était incarné dans le Thibet ; et ils ont été chercher solennellement cet enfant de cinq ans pour le replacer sur son trône impérissable. Pendant que nous étions campés dans le Koû-Kou-Noor, sur les bords de la mer Bleue, nous vîmes passer la grande caravane des Khalkhas qui allait inviter à Lha-Ssa le Lama-Roi du Grand-Kouren.

Le Kouren des mille Lamas — Mingan Lamané Kouré — est aussi une lamaserie célèbre, qui date de l'envahissement