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cheminant lentement avec leurs longues processions de sarligues, ou bœufs à long poil, vont se confondre avec les Mantchous des bords du Songari et de l'Amour, qui arrivent portés sur des traîneaux. C'est un mouvement continuel de pavillons qui se tendent ou se ploient ; ce sont des multitudes de pèlerins qui arrivent ou qui partent, sur des chameaux, des bœufs, des sarligues, des voitures, des traîneaux, à pied, à cheval, en mille bizarres équipages.

Vues de loin, les blanches cellules des Lamas, bâties en lignes horizontales, au-dessus les unes des autres sur le penchant de la montagne, ressemblent aux degrés d'un autel grandiose, dont le tabernacle serait le temple du Guison-Tamba. Du fond de ce sanctuaire, dont les dorures et les vives couleurs resplendissent de toute part, le Lama-Roi reçoit les hommages perpétuels de cette foule d'adorateurs incessamment prosternés devant lui. Dans le pays il est appelé le Saint par excellence, et il n'est pas un seul Tartare Khalkha qui ne se fasse honneur de se dire son disciple. Quand on rencontre un habitant du Grand-Kouren, si on lui demande d'où il est... Koure Bokte-Ain Chabi, répond-il avec fierté, Je suis disciple du saint Kouren.

A une demi-lieue de la lamaserie, et non loin des bords du fleuve Toula, se trouve une grande station de commerçants chinois. Leurs maisons de bois ou de terre sont toujours entourées de palissades en pieux, pour se garantir des voleurs ; car les pèlerins, malgré toute leur dévotion, ne se font pas faute de piller sans scrupule le bien d'autrui. Une montre et quelques lingots d'argent volés pendant la nuit dans la tente de M. Gabet, ne nous ont pas permis de