Page:Huc - Souvenirs d’un voyage dans la Tartarie, le Thibet et la Chine pendant les années 1844-46, tome 1.djvu/126

Cette page n’a pas encore été corrigée

droite et à gauche, sous les bras, par deux membres de la famille ; derrière la malade marchaient les huit Lamas, qui faisaient retentir les airs de leur épouvantable musique. On conduisit ainsi la vieille dans une tente voisine ; car le Lama médecin avait décidé que, durant une lune entière, elle ne pourrait retourner dans son ancienne habitation.

Après ce bizarre traitement, la malade fut entièrement guérie ; les accès de fièvre ne revinrent plus. Comme l'accès devait précisément avoir lieu à l'heure même où commença la scène infernale, il est probable que la fièvre fut naturellement coupée par une violente surexcitation, occasionnée par le spectacle le plus effrayant et le plus fantastique qu'on puisse imaginer.

Quoique la plupart des Lamas cherchent à entretenir l'ignorante crédulité des Tartares, pour l'exploiter ensuite à leur profit, nous en avons pourtant rencontré quelquefois, qui nous avouaient avec franchise que la duplicité et l'imposture jouaient un grand rôle dans toutes leurs cérémonies. Un supérieur de lamaserie nous disait un jour : Quand un homme est malade, réciter des prières c'est convenable ; car Bouddha est le maître de la vie et de la mort ; c'est lui qui règle la transmigration des êtres : prendre des remèdes, c'est bien aussi ; car le grand bienfait des herbes médicales nous vient de Bouddha. Que le Tchutgour puisse se loger chez un malade, cela est croyable ; mais que, pour le chasser et le décider à partir, il faille lui donner des habits et un cheval, voilà qui a été inventé par les lamas ignorants et trompeurs, qui veulent amasser des richesses aux dépens de leurs frères.

La manière d'enterrer les morts parmi les Tartares n'est