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disent les Tartares, cela revient absolument au même.

Après le traitement médical employé pour faciliter l'expulsion du diable, le Lama ordonne des prières, conformes à la qualité de ce diable qu'il faut déloger. Si le malade est pauvre, évidemment le Tchutgour est petit ; et alors les prières sont courtes, peu solennelles ; quelquefois on se borne à une simple formule d'exorcisme ; souvent même le Lama se contente de dire qu'il n'est besoin ni de pilules ni de prière, qu'il faut attendre avec patience que le malade guérisse ou succombe, suivant l'arrêt prononcé par Hormoustha. Mais si le malade est riche, s'il est possesseur de nombreux troupeaux, les choses vont tout différemment. D'abord il faut se bien persuader que le diable dont la présence a fait naître la maladie, est un diable puissant et terrible ; incontestablement c'est un des chefs des mauvais esprits ; et comme il n'est pas décent qu'un grand Tchutgour voyage comme un diablotin, on doit lui préparer de beaux habits, un beau chapeau, une belle paire de bottes, et surtout un jeune et vigoureux cheval : s'il n'y a pas tout cela, il est certain que le diable ne s'en ira pas : ce serait en vain qu'on administrerait des remèdes et qu'on réciterait des prières. Il peut même arriver qu'un cheval ne suffise pas ; car parfois le diable est tellement élevé en dignité, qu'il traîne à sa suite un grand nombre de serviteurs et de courtisans : alors le nombre des chevaux que le Lama exige est illimité ; cela dépend toujours de la richesse plus ou moins grande du malade.

Tout étant disposé conformément au programme dressé par le médecin, la cérémonie commence. On invite plusieurs