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de purification[1], puis il offre un agneau en ‘olâ, une brebis en ḫaṭṭât et un bélier en zebaḫ shelamim. Il se rase les cheveux et les jette sur le feu où cuit la viande du shelamim[2]. Lorsque le sacrificateur fait le zebaḫ shelamim, il met sur les mains du nazir la teroumâ, la tenouphâ, c’est-à-dire les parties consacrées, et un gâteau de l’offrande correspondante[3]. Après quoi ces oblations sont présentées à Jahwe. Ensuite, dit le texte, le nazir pourra boire du vin, c’est-à-dire qu’il est délié de la consécration. Elle est passée d’une part sur ses cheveux coupés et offerts sur l’autel, de l’autre sur la victime qui le représente. L’une et l’autre chose sont éliminées. Le processus est donc le même que dans l’expiation. Le caractère sacré, quelle qu’en soit la haute valeur religieuse, va du sacrifiant à la victime. Par conséquent le sacrifice d’expiation n’est lui-même qu’une variété particulière d’un type plus général, qui est indépendant du caractère favorable ou défavorable de l’état religieux affecté par le sacrifice On pourrait l’appeler sacrifice de désacralisation.

Les choses, comme les personnes, peuvent se trouver en un état de si grande sainteté qu’elles en deviennent inutilisables et dangereuses. Des sacrifices de ce genre deviennent nécessaires. C’est le cas, en particulier, des produits du sol. Chaque espèce de fruits, céréales et autres, est tout entière sacrée, interdite, tant qu’un rite, souvent bien symbolique, n’en a pas fait disparaître l’interdit qui la garde[4]. Dans ce but, on concentre sur une partie des fruits toute la vertu que contiennent les autres. Puis on sacrifie cette

  1. Ib., II, 10.
  2. Nazir, ib., VI, 7 et 8. — Nombres, VI, 18.
  3. Nombres, VI, 19.
  4. Voir surtout Frazer, Golden Rough, note additionnelle au t. II, pour un certain nombre de faits ethnographiques : cf. ib., II, p. 62 sqq. Il serait aisé d’étendre le nombre de faits cités. M. F. a vu avec raison que la plupart des offrandes de premiers fruits consistent en la consécration d’une partie de l’espèce comestible, partie qui représente le tout. Mais son analyse, si consciencieuse, n’a pas rendu compte de la fonction du rite.