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LABRADOR ET ANTICOSTI

« Abondante en poisson, cette mer continua d’être fréquentée, et le port de Brest devint le rendez-vous d’un grand nombre de pêcheurs français. Lewis Roberts dans son Dictionnaire du Commerce, imprimé à Londres en 1600, dit que c’était le principal poste de la Nouvelle-France, la résidence d’un gouverneur, d’un aumônier et de quelques autres officiers ; que les Français en exportaient de grandes quantités de morues, des barbes et des huiles de baleine, ainsi que des castors et autres fourrures précieuses. Il ajoute qu’ils entretenaient un fort à Tadoussac, pour y faire le trafic des pelleteries avec les sauvages. Il est difficile de déterminer ce qu’il y a de vrai dans l’assertion de cet auteur ; mais il est bien certain que sur la baie de Saint-Paul se trouvent des ruines qui ont conservé le nom de Vieux-Fort[1]. Le même nom est donné à ce lieu dans les cartes attachées à l’histoire du Canada par Charlevoix.

  1. Ces ruines consistaient, paraît-il, en une sorte de plate-forme en terre de figure quadrilatérale.

    Mais aujourd’hui il ne reste plus de vestiges de ces ruines. Voici là-dessus ce que m’a écrit M. l’abbé G. Gagnon, qui fut missionnaire du Labrador inférieur en 1894-95. « Je ne suis passé par le Vieux-Fort que par eau et quand les gens étaient tous sur les Îles du large pour la saison de pêche ; de sorte que je ne sais rien de visu des ruines du Vieux-Fort. Mais les gens m’ont dit qu’il n’apparaît plus aucune trace des anciens établissements. Seul le père Faguy dit avoir vu des ruines dans son jeune temps, et avoir entendu dire aux vieux de cette époque qu’une batterie de canons se trouvait sur le haut rocher qui domine l’entrée du havre. » — M. l’abbé P. Théberge, qui résida au Labrador inférieur de 1883 à 1894, m’écrivait ceci : « Il y a l’île du Vieux-Fort au large, et le Vieux-Fort, quartier d’hiver, à quelque sept milles à l’intérieur. Je les ai visités bien des fois : on n’y voit plus de traces des ruines. C’est une famille de Robin qui occupe ces deux places. » — « Je suis allé plusieurs fois à Bonne-Espérance, dit M. P. Vigneau dans une lettre datée du 30 juin 1897, mais je n’y suis jamais demeuré assez longtemps pour aller faire aucune excursion dans les parages du Vieux-Fort. Par exemple, j’ai vu le vieux canon qu’on y a trouvé (ou à terre ou au fond de l’eau). Je l’ai mesuré le 18 avril 1892, en revenant de la chasse au loup marin. Quoique le bouton de la culasse soit disparu par la rouille, sa longueur totale est de 7 pieds et 6 pouces, — 6 pieds de la lumière à la gueule ; calibre, 4 pouces de diamètre. C’est probablement le plus ancien canon qui existe en Amérique. » — En avril 1897, M. l’abbé A. Dalay, prêtre français qui s’occupe des missions du Labrador, m’écrivait : « De nombreux vestiges indiquent encore aujourd’hui qu’il y avait à Brador au moins 200 maisons et au moins 1000 habitants en hiver. On trouve encore des restes d’armures militaires, de casques, des canons, un peu de tous les côtés, tant à Brador qu’à Bonne-Espérance… D’après une carte que l’on voit au presbytère de la Tabatière, Brador se trouvait entre deux forts : Old Fort, à 30 milles environ en haut de Brador, et Pontchartrain, à une très petite distance en bas. Old Fort ! Beaucoup se demandent ce