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MAGPIE — SAINT-JEAN

que l’on y voit, et dont il y a bien une dizaine. De 1875 à 1882 environ, la compagnie Collas et Frère fit aussi la pêche à Saint-Jean, et ses constructions étaient élevées du côté nord-est de la rivière.

Le plus ancien établissement de Saint-Jean est celui de M. Philéas Sirois, de l’Islet, qui y fait la pêche depuis 1857 et vend à la maison LeBoutillier toute la morue qu’il prépare. Il emploie 33 barges à son industrie. Ses constructions comprennent, outre sa résidence d’été, huit cookrooms, un magasin, deux hangars à morue et deux hangars à sel. Il fait aussi la traite des fourrures avec les sauvages, et par conséquent aussi il leur avance des marchandises et des provisions, ainsi qu’aux blancs qu’il a à son service. Mais il n’emploie que quatre hommes de Saint-Jean ; les 106 autres viennent de l’Islet, de Montmagny et surtout de la baie des Chaleurs. Durant l’hiver, ses Gaspésiens s’approvisionnent à son compte chez les LeBoutillier. Ce genre de commerce, imposé aux bourgeois par les circonstances, ne vaut certes pas le système des ventes au comptant ; car, suivant la méthode usitée au Labrador, tout dépend du succès de la chasse ou de la pêche. Et si, à la fin de la saison, il reste des balances de compte dans les livres du marchand, ce n’est le plus souvent que pour la forme.

On ne prend ici que peu de hareng, et à l’automne seulement.

Il y a dans le fleuve deux rets à saumon, qui donnent chaque armée une vingtaine de barils de ce poisson. Mais la rivière Saint-Jean en fournit quarante à cinquante mille livres. Les huit rets qui y sont tendus appartiennent à des Gaspésiens. En outre, plus à l’intérieur des terres, on y fait la pêche à la ligne. Les « officiers » — des États-Unis, ceux-là — qui viennent y traquer le noble poisson, se sont fait construire une habitation très confortable, placée à 27 milles de l’embouchure de la rivière. On ne se rend pas aussi loin, sans doute, en bateau à vapeur. Car la rivière Saint-Jean n’est navigable pour les barges que durant quelques milles ; au delà, elle a le grave inconvénient de manquer d’eau, dont elle n’a plus que ce