Page:Huard - Labrador et Anticosti, 1897.djvu/175

Cette page a été validée par deux contributeurs.
159
SHELDRAKE — RIVIÈRE-AU-TONNERRE

Il y a du côté ouest île la rivière au Tonnerre, cinq « cookrooms », trois où logent les drafiers (ceux qui pêchent la morue), un pour les trancheurs (ceux qui préparent le poisson) et un pour les graviers (qui le font sécher). Ces dénominations auxquelles il faudrait aussi ajouter celle de saleurs (ceux qui salent la morue), indiquent les diverses catégories d’hommes que l’on emploie. « Gravier » vient de « grave », manière dont les gens de certains endroits de la Côte prononcent le mot « grève ».

Outre les pêcheurs à la draft, un certain nombre d’habitants pêchent la morue en fournissant eux-mêmes les embarcations, etc., et font sécher le poisson chez eux. Ils sont certains de vendre aux « bourgeois » toute la morue sèche qu’ils pourront préparer, même après la date du 20 août, où finissent les contrats des drafiers. Ils préfèrent pourtant, après cette date, réserver la grosse morue pour la saler et la vendre verte à Québec. Ces gens se font ainsi un gain annuel moyen variant de $200 à $400. Plusieurs font aussi la chasse pendant l’hiver et accroissent leurs revenus de $100 à $200. C’est, sinon la richesse, au moins l’aisance.

Il y a ici environ 85 barges de pêche, ce qui indique assez l’importance de l’endroit. On va pêcher à quelques milles au large, et les barges s’y mettent en ligne en laissant entre elles une distance de quelques arpents.

Une barge toute gréée coûte environ $100.

Chaque jour, nombre de pêcheurs apportent à Monseigneur les petits pavillons de leurs barges pour les faire bénir. On voit souvent sur ces pavillons l’emblème du Sacré-Cœur, les lettres J. M. J., etc.

Lundi, 24 juin. — La retraite s’est terminée ce matin, et nous devions partir immédiatement pour Magpie ; mais la température est loin de le permettre. Depuis jeudi, le jour de notre arrivée, il fait un fort vent d’est, et depuis vendredi la pluie n’a pas cessé de tomber. Il n’est donc pas possible que nous nous mettions en route aujourd’hui. Cependant M. l’abbé Bouchard,