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Le prudent Télémaque, à cette offre si tendre :
« Ne me retiens donc pas, Atride, plus longtemps.
Certes je passerais une année à t’entendre,
Sans regretter en rien ma maison, mes parents,
Tant j’éprouve de charme à tes récits de geste.
Mais quoi ! mes compagnons geignent sur mon vaisseau,
Dans la dive Pylos, et tu veux que je reste !
Pour tes présents, merci ; je n’attends qu’un joyau.
Tes coursiers n’iront point à ma côte natale ;
Je te laisse en jouir. Ton royaume est doté
De lotus, de souchet, de graine fromentale,
D’épeautre, d’orge blanche en folle quantité.
Ithaque ne contient ni plaines ni fourrages ;
Caprine, elle vaut mieux pourtant qu’un sol à foins.
Aucune île en pleins flots n’abonde en pâturages,
N’est propice au cheval, la mienne encore moins. »

Il dit ; et Ménélas, au cri de guerre habile,
Prit sa main en riant et lui darda ces mots :
« Noble est ton sang, mon fils, j’en juge à tes propos.
Eh bien, je changerai mes cadeaux, c’est facile.
Tu recevras de moi le plus beau des trésors
Que recèle en ses murs mon palais grandiose :
Un cratère artistique ; il est tout d’argyrose,
Et l’or pur savamment en couronne les bords.
C’est l’œuvre d’Héphestès ; je le tins de Phédime,
Roi des Sidoniens, quand m’accueillit son toit,
À mon retour en Grèce : il te revient de droit. »

Telle se prolongeait leur causerie intime.
Les commensaux du prince affluèrent bientôt,
Amenant des brebis, apportant leur vinage ;