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Convoquèrent les Grecs en masse, à la nuit close ;
Les Grecs étant venus, par le vin alourdis,
De cet appel étrange ils leur dirent la cause.
Or, Ménélas aux siens ordonne de s’unir
Pour songer au retour sur les liquides combes.
Agamemnon enrage : il voulait retenir
Le peuple, et présenter de saintes hécatombes,
Afin de conjurer la fureur de Pallas.
Le fol ! il ignorait qu’elle était inflexible,
Car l’esprit des grands dieux ainsi ne tourne pas.
Lors des propos princiers l’échange fut terrible.
Les Grecs aux beaux jambarts de se lever soudain,
Poussant mille clameurs : l’ost en deux se partage.
La nuit on ne rêva que mutuel dommage,
Car Zeus nous apprêtait un dommage certain.
Dès l’aube, maint de nous mit à flot son navire,
Chargé d’or, de beautés au large ceinturon.
La moitié du camp grec demeura sous l’empire
Du pasteur des humains, Atride Agamemnon.
Pour nous, l’autre moitié, rembarqués, nous partîmes.
Nos prames rasaient l’onde : un dieu l’aplanissait.
Mouillant à Ténédos, on offrit des victimes
Pour le rapatriement ; mais Zeus ne le pressait.
Le cruel derechef divisa la milice.
D’aucuns, de leurs vaisseaux retournant le timon,
Rentrèrent, sous leur roi, l’habile et sage Ulysse :
Ils voulaient plaire encore au maître Agamemnon.
Quant à moi, sur mes nefs qui voguaient de conserve
Je m’enfuis, pressentant les ciseaux d’Atropos.
Tydide nous suivit, emmenant sa caterve,
Et le blond Ménélas put nous joindre à Lesbos
Où du plan de voyage on traçait une ébauche,