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Pendant six jours entiers, nous traversons les flots.
Le lendemain, on voit émerger l’acropole
De Lamus, Télépyle, abri des Lestrygons.
Là, dès qu’un berger rentre, aux champs un autre vole.
Qui dort peu s’y ferait des salaires féconds
À paître après les bœufs les candides agnelles,
Tant les chemins du jour touchent ceux de la nuit.
Nous entrons dans le port aux rives solennelles
Que de tous les côtés un haut rocher circuit.
Ces rivages saillants jusques à l’embouchure
S’avancent recourbés ; le passage est étroit.
C’est là que mes marins s’enfoncent à mesure ;
Ils resserrent leurs nefs dans ce limpide endroit,
Où la vague jamais tant soit peu ne s’excite,
Où domine au contraire un silence riant.
Seul je laisse en dehors, à la pointe du site,
Mon navire poisseux, aux roches le liant.

Ensuite j’escalade un coupeau solitaire.
Nuls travaux, sous mes pieds, ni d’hommes ni de bœufs ;
Rien qu’une acre fumée arrivant de la terre.
Je choisis deux soldats, un céryce avec eux,
Qu’en avant je dépêche, afin de reconnaître
Les gens qui de ce sol consomment le froment.
Ils suivent le chemin par où journellement
Les chars à la cité portaient le bois champêtre.
Ils notent prés des murs, allant puiser de l’eau,
Une vierge, l’enfant du despote Antiphate.
La princesse gagnait la source délicate
D’Artacia : l’urbain s’abreuve à son ruisseau.
L’escouade, approchant, de l’infante réclame
Le nom de sa contrée et celui de son roi.