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Car son destin n’est point de mourir loin des siens,
Mais de revoir bientôt les rives de la Grèce,
Sa demeure élevée et ses concitoyens. »

Il dit ; et Calypso, la sublime déesse,
Frémit et riposta par ce discours ailé :
« Dieux, vous êtes cruels, jaloux plus que personne,
Vous qui ne voulez point qu’une dive se donne
À l’humain qu’elle élut pour son mari zélé.
Ainsi, quand d’Orion s’éprit la blanche Aurore,
Contre lui vos Grandeurs rugirent tellement
Que la chaste Artémis, dont le ciel se décore,
L’attaqua dans Ortyge et le flécha gaîment.
De même, quand Cérès, à la couronne blonde,
Suivant son propre instinct, s’unit à Jasion
Dans un terrain tiercé, Zeus, sachant l’action,
Darda sur l’amoureux sa foudre furibonde.
Ores vous m’enviez, vous dieux, cet homme-époux.
Je le sauvai pourtant, lorsque à sa quille, au large,
Seul il pendait : Jupin, d’une horrible décharge,
Venait d’ouvrir sa nef au sein des noirs remous.
Ses braves compagnons alors de disparaître ;
Pour lui, l’onde et le vent chez moi l’ont apporté.
Je l’admis, l’hébergeai, puis j’osai lui promettre
La jeunesse éternelle et l’immortalité.
Mais puisque aucun des dieux du foudroyant monarque
Ne peut enfreindre ou bien éluder les mandats,
Qu’il parte, ainsi que Zeus l’ordonne, et qu’il s’embarque
Sur l’onde atroce : moi, je ne le chasse pas.
Car je n’ai ni vaisseaux ni marins volontaires
Pour l’aider à franchir la mer aux vastes flancs ;
Ains je lui donnerai des conseils bons et francs,