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combat, tu menais l’armée à Ilios. Crains qu’un des Dieux éternels ne se rue sur toi du haut de l’Olympos, surtout l’Archer Apollôn qui protège les Troiens. Reviens après avoir sauvé les nefs, et laisse-les combattre dans la plaine. Qu’il vous plaise, ô père Zeus, ô Athènè, ô Apollôn, que nul d’entre les Troiens et les Akhaiens n’évite la mort, et que, seuls, nous survivions tous deux et renversions les murailles sacrées d’Ilios !

Et ils se parlaient ainsi. Mais Aias ne suffisait plus au combat, tant il était accablé de traits. Et l’esprit de Zeus et les Troiens illustres l’emportaient sur lui ; et son casque splendide, dont les aigrettes étaient rompues par les coups, sonnait autour de ses tempes, et son épaule fatiguée ne pouvait plus soutenir le poids du bouclier. Et cependant, malgré la nuée des traits, ils ne pouvaient l’ébranler, bien que respirant à peine, inondé de la sueur de tous ses membres, et haletant sous des maux multipliés.

Et Hektôr frappa de sa grande épée la lance de frêne d’Aias, et il la coupa là où la pointe se joignait au bois ; et le Télamônien Aias n’agita plus dans sa main qu’une lance mutilée, car la pointe d’airain, en tombant, sonna contre terre. Et Aias, dans son cœur irréprochable, reconnut avec horreur l’œuvre des Dieux, et vit que Zeus qui tonne dans les hauteurs, domptant son courage, donnait la victoire aux Troiens. Et il se retira loin des traits, et les Troiens jetèrent le feu infatigable sur la nef rapide, et la flamme inextinguible enveloppa aussitôt la poupe, et Akhilleus, frappant ses cuisses, dit à Patroklos :

— Hâte-toi, divin Patroklos ! Je vois le feu ardent sur les nefs. Si elles brûlent, nous ne pourrons plus songer au retour. Revêts promptement mes armes, et j’assemblerai mon peuple.

Il parla ainsi, et Patroklos se couvrit de l’airain splendide. Il attacha de belles knèmides à ses jambes avec des