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losophie ; il ne savoit ni lire ni écrire. Il avoit même si peu de fermeté qu’il eût été forcé à soutenir la gageure par l’adresse d’un de ses spectateurs. Dès qu’il commença à s’élever & à devenir célèbre  ; Corais, puissant Arabe, jaloux qu’un homme de néant eut l’audace d’abuser le peuple, se déclara son ennemi & traversa son entreprise, mais le peuple, persuadé que Mahomet avait des conférences continuelles avec Dieu & ses anges, fit qu’il l’emporta sur son ennemi. La famille de Corais eut le dessous & Mahomet, se voyant suivi d’une foule imbécile qui le croyoit un homme divin,

    avoit appris toute la finesse & les beautés. Il n’étoit pas ignorant dans l’art de savoir rendre odieux ce qui est véritablement condamnable & de peindre la vérité avec des couleurs simples & vives, qui ne permettent pas de la méconnoître. En effet, tout ce qu’il dit est vrai par rapport aux dogmes essentiels de la religion, mais il n’a pas dit tout ce qui est vrai, & c’est en cela seul que notre religion diffère de la sienne.  » Il ajoute plus bas « que Mahomet n’est ni grossier, ni barbare, qu’il a conduit son entreprise avec tout l’art, toute la délicatesse, toute la circonstance, l’intrépidité, les grandes vues dont Alexandre & César eussent été capables à sa place, &c. » (Vie de Mahomet par le Comte de Boulainvilliers, liv. 2, p. 266, 267 & 268, édition d’Amst. 1731.)