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bitieux épris de la douceur d’être élevés au-dessus de leurs semblables, ceux-ci tâchèrent de se mettre en réputation en feignant d’être les amis des Dieux invisibles que le vulgaire redoutoit. Pour y mieux réussir, chacun les peignit à sa mode & prit la licence de les multiplier au point qu’on en trouvait à chaque pas.

§. 7.

La matière informe du monde fut appelée le Dieu Cahos. On fit de même un Dieu du Ciel, de la Terre, de la Mer, du Feu, des Vents & des Planettes. On fit le même honneur aux hommes & aux femmes  ; les oiseaux, les reptiles, le crocodile, le veau, le chien, l’agneau, le serpent & le pourceau, en un mot toutes sortes d’animaux & de plantes furent adorés. Chaque fleuve, chaque fontaine porta le nom d’un Dieu, chaque maison eut le sien, chaque homme eut son génie. Enfin, tout étoit plein, tant dessus que dessous la terre, de Dieux, d’Esprits, d’Ombres & de Démons. Ce n’étoit pas encore assez de feindre des Divinités dans tous les lieux imaginables  ; on eût cru offenser le temps, le jour, la nuit, la concorde, l’amour, la paix, la victoire, la contention, la rouille, l’honneur, la vertu,