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C’est ce qui arriva en effet. Moins de trois heures après nous étions en perdition, la coque inclinée à 45 degrés, l’arrière ne remontant même plus au-dessus des vagues.

Un seul espoir de salut nous restait. Il semblait que le lointain paquebot eût aperçu enfin nos signaux, car depuis plus d’une heure il se rapprochait, grandissait.

Bientôt nous pûmes distinguer à l’œil nu qu’il avait le cap sur nous, et le timonier même assura qu’il forçait la vapeur. Arriverait-il à temps ? Telle était l’unique question que nous nous posions maintenant, Yvonne et moi, les mains étroitement unies, prêts à affronter courageusement la mort, si elle devait nous prendre enfin, après nous avoir si miraculeusement et si opiniâtrement épargnés.

Et, tout à coup, à bout de nerfs, à bout de force, toute son énergie prophétique à la dérive, convaincue que le salut arriverait trop tard et que c’était bien la mort cette fois, Yvonne s’abattit contre mon épaule, et je l’entendis qui murmurait, à travers ses sanglots :

— Pardon !… je te demande pardon !…

Je n’eus pas le temps de lui répondre. Un appel de sirène ébranla les espaces. Une ombre gigantesque se pencha sur nous. Quelques minu-