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aux flammes et tourbillonnaient ensuite autour de nous avec un grésillement, un bourdonnement énervants. Sur le sable, tout près, s’entendaient des reptations furtives de bêtes plus ou moins lourdes et tardigrades pour lesquelles j’éprouvais le plus profond dégoût ; au surplus, la forêt elle-même n’était plus tout à fait silencieuse, car, à deux ou trois reprises déjà, j’avais entendu un lointain ricanement de fauve ou d’oiseau nocturne.

Je ne sais si vous êtes comme moi, mais mon cerveau ressemble terriblement à mon estomac. Ni l’un ni l’autre ne prennent jamais le moindre repos. La nuit même, tandis que je tombe à l’inconscience, ils continuent de fonctionner à vide, broient des idées et des aliments, peuplent leurs loisirs et mon sommeil d’affreux cauchemars. En cas d’insomnie c’est pire encore, d’indicibles horripilations me tiennent haletant sur l’oreiller, et je n’ai plus d’autre dérivatif que la lecture, moi qui l’exècre.

Cette fois encore, vers minuit, je crois, j’eus recours à ce remède in extremis, le hasard l’ayant d’ailleurs placé à la portée de ma main sous la forme d’un exemplaire de Graziella, le seul volume que ma femme eût cru devoir emporter en voyage. Une trentaine d’années aupa-