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prince de Déols ; marcha contre eux avec une armée assez nombreuse, les battit à Châtillon et les poursuivit jusqu’à Loches, « les ponts qui estoient entre eux et luy rompit, les bois biaïns, les voyes et fleuves publiques, empescha par toutes les manières qu’il put empescher l’entrée de sa terre… et toute la grande compaignie mit en fuite, et jusques à Orléans les poursuivit, et voulussent ou non, leur fit passer la Loire, et les enclouit entre Loire et Seine. » (Chronique de frère Jehan de la Gogue, prieur de Saint-Gildas.) Il mourut des blessures qu’il avait reçues dans cette campagne, et fut enterré à Saint-Aignan d’Orléans[1].

En nous reportant à son origine, c’est-à-dire au temps qui suivit la destruction totale de 742, nous pouvons nous figurer le donjon bâti au sommet d’une motte factice, à l’endroit même où nous le voyons aujourd’hui. Une tour de pierre succéda à la construction de bois du Ve siècle ; on rétablit les palis de la première enceinte, et on planta une

  1. Quelques auteurs prétendent qu’il s’agit des Hongrois. Le frère de la Gogue parle des Huns, Daces et Vandales, venus après les Normands. De quelque nom qu’on les nomme, de quelque côté qu’ils viennent, nous voulons seulement faire remarquer que le Berry, par sa position centrale, était le lieu de refuge devant toutes les invasions. Les moines de Ruyens en Bretagne y apportaient les reliques de saint GiLdas et le corps de saint Paterne qu’ils avaient trouvé abandonné à Rennes. Ils rencontraient à Preuilly les clercs de Rennes qui fuyaient avec le corps de saint Mélaine. Ce dernier saint refusa d’aller plus loin, et resta dans le château de Preuilly, où le seigneur lui fit construire une église. Les moines de Saint-Martin de Tours voulaient peut-être aussi prendre cette direction, quand ils apportaient leurs trésors et leurs reliques jusqu’au monastère de Cormery, que les Normands détruisirent. — En sens inverse, les moines de l’Estrèe, en Berry, fuyant devant les Hongrois, apportaient à Loches, en 951, les reliques de saint Genouph. Tous ces faits font ressortir l’importance stratégique du château de Loches. — V. Baronius, Ann. Bened., etc.