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Heureusement ces prejugés sont totalement dissipés. L’Europe litteraire & savante ne fait plus, pour ainsi dire, qu’une seule societé, reünie par un objet commun, qui est le progrés des Sciences & des Lettres. Tous y travaillent avec la même ardeur, & ne font marcher la gloire particuliere de leur Nation, ou d’eux mêmes, que bien aprés l’utilité générale ; ou plutot, connoissant mieux a présent les interets de cette gloire, ils n’ont garde de la croire interessée à soutenir un préjugé, capable de relever les ruïnes de l’ignorance & de la barbarie.

N’est-il pas juste de tirer de ces heureuses dispositions tout le fruit que l’interêt des Lettres en peut esperer ? Et puisque le commerce des connoissances & des découvertes est ouvert à present par tout, n’est il pas tems de penser à ce qui peut favoriser ce commerce, l’etendre, & par là porter l’abondance dans tout l’Empire des Lettres en general, & reünir dans chacune de ses principales provinces, les tresors du monde entier ?

Or comment peut-on mieux remplir cet objet, qu’en admettant dans chaque societé Litteraire un nombre d’etrangers, qui, y representant leur nation, y veillent à ses interêts, en lui faisant part de ce qui s’y passe, & portant, en même tems, dans cette même Societé le génie de leur patrie, & les connoissances litteraires & scientifiques qui lui sont propres, soient en ce genre le nœud commun de l’union des Nations.

Il semble que l’on ait dejà senti, du moins à un certain point, la nécessité de cet arrangement. La pluspart des Academies se sont choisi dans differentes parties de l’Europe, des correspondans parmi les gens de la plus grande réputation ; mais, outre qu’il s’en faut de beaucoup, que cette correspondance etablie soit bien reglée, puisqu’au contraire elle ne consiste souvent qu’en un vain titre ; quelle difference, de consulter dans ces cas pressans & singuliers, un Savant