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LES HOMOSEXUELS

« Pas de malfaiteurs ici, pas d’assassins, pas de voleurs. Mais des malheureux, des hors la loi, qui traînent après eux, au cours de leur vie solitaire, la malédiction d’une énigme mystérieuse de la nature. Des hommes qui ont acquis par une lutte de tous les jours, une position enviée. Des travailleurs honnêtes, dont l’honorabilité est hors de doute, dont la parole et le nom représentent une valeur ; et qui pourtant, sous la menace d’un paragraphe de loi moyen-âgeux sont contraints de se réunir, apeurés et isolés, loin des heureux normaux, pour confesser entre soi leurs penchants invincibles, toujours exposés aux coups de la loi, au mépris des ignorants, aux pièges des « maîtres-chanteurs. »

« Nous quittons ces lieux avec, dans notre cœur sain, un sentiment de pitié pour ces pauvres malades que l’ignorance indigne de notre siècle a placé au même rang que des malfaiteurs. Au-dessous de nous scintillent les étoiles d’un ciel de juillet, et la pâle clarté de la lune bleuit les toits. Le veilleur de nuit avec son énorme trousseau de clefs passe auprès de nous, il se glisse le long des hautes maisons ; sous un porche un couple d’amoureux se serre les mains avec ferveur, cependant que