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LES HOMOSEXUELS

Quand les lumières furent éteintes en haut il alla dans le premier cabaret qu’il rencontra, vida, assis dans un coin discret, plusieurs verres d’eau-de-vie coup sur coup, fit autant dans un deuxième et un troisième caboulots et dépensa jusqu’à son dernier sou dans d’autres établissements déserts pour y boire du café noir au kirsch. Il rentra enfin chez lui, monta les quatre étages et fut pris d’un accès de surexcitation telle qu’il cassa la lampe pour s’ouvrir les artères avec le verre.

Un ami du malade m’appela auprès, je lui pansai une blessure après l’autre ; il ne se plaignait pas et ne dit pas un mot, mais la flamme de ses yeux parlait, la pâleur de ses lèvres parlait de ses souffrances terribles et du devoir noble et sacré de ceux qui travaillent pour l’émancipation des uraniens.

L’hiver passé les réceptions d’un artiste uranien jouissaient surtout d’une grande faveur. Le maître de céans recevait ses invités, parmi lesquels il y avait beaucoup d’étrangers homosexuels, surtout des provinces russes de la Baltique, des pays Scandinaves, ainsi que des dames homosexuelles, — affublé d’un costume qui était une synthèse hardie de la robe princesse et de la toge du magistrat.