Page:Hirsch - Un vieux bougre, 1908.djvu/263

Cette page a été validée par deux contributeurs.
259
UN VIEUX BOUGRE

Ce trait blessa Mlle Youyou profondément. L’effrontée marchait à reculons pour la voir, et elle riait, heureuse de plaire au fils Roubeau. Même, il revint sur ses pas pour lui donner une bourrade, en témoignage de la plus galante camaraderie. La gamine suffoquait d’amour et d’orgueil :

— Ah ! m’sieu’ Jean, on a-t-il du jeu à c’t heure ! soupira-t-elle.

Il n’osa point l’embrasser, à cause de Mlle Youyou qui pouvait le narguer ; mais il la saisit au coude et, la poussant :

— T’es d’ chez Menu… d’ Jupelle ? demanda-t-il.

Les grands avaient de ces façons sur leurs terres, jadis. La fillette murmura :

— Oui, m’sieu’ Jean… et on m’appelle Martine…

Elle courut sus à la Rouge, qu’elle excita d’une tape sur le flanc, et elle mordit dans son pain parce que le péché la tourmentait. Mlle Youyou s’éloigna, et, tandis qu’elle allait gonflée de colère, défiant les champs vides, gras et bruns, étendus jusqu’à l’horizon, elle cria :