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UN VIEUX BOUGRE

éviter de voir Gaspard dont la respiration emplissait le silence. L’épouvante avait achevé l’œuvre de la fatigue sur Mlle  Youyou qui s’était endormie, la tête sur cette même table. Des frissons la secouaient encore et sa chaise craquait.

Mlle  Rubis, elle, s’était rapprochée du lit. Elle ne pouvait distraire sa vue de l’aïeul ; et elle était debout, jouant sans cesse des doigts de sa main droite, avec la bague qu’elle portait à l’annulaire de la gauche. Inconsciemment, elle imitait les grimaces qui tourmentaient le visage de Gaspard d’une expression violente, rapide, laquelle s’étant effacée, il réalisait la toute-puissance du calme qui rayonne des morts.

Parfois, les lèvres muettes bougeaient. La femme se courbait, avide de leur secret. Deux fois, pour ranimer d’une piqûre ce corps inerte, elle ôta la broche de son corsage. Un bruit furtif, chaque fois, l’avait arrêtée, la pointe très voisine de la chair. Elle se résignait à attendre, possédée d’une frénésie d’action. Plus qu’un caprice exaspéré par la résistance, c’était, entier, despotique, le désir brutal et