De par la volonté des Dieux, le cocher, qui aurait dû se taire, répondit :
« Seigneur, il n’a plus ni intelligence, ni sens, ni souffle ; il dort, sans conscience, pareil à l’herbe et au bois ; il ignore, maintenant, le plaisir et la douleur, et, comme ses amis, ses ennemis l’ont abandonné. »
Le prince fut troublé et il dit : « Une telle condition n’a-t-elle été faite qu’à cet homme, ou une même fin attend-elle toutes les créatures ? »
Le cocher répondit : « Une même fin attend toutes les créatures. De tout être qui vit en ce monde la mort est fatale, qu’il soit vil ou qu’il soit noble. »
Alors le prince Siddhârtha connut ce qu’est la mort ; malgré sa fermeté, il frissonna ; il dut s’appuyer au char, et ses paroles furent pleines d’affliction :
« Voilà donc où le destin mène les créatures ! Et pourtant, libre de crainte, l’homme se livre à mille amusements ! Ah, je commence à croire que l’âme de l’homme est endurcie ! La mort est là, et il s’en va joyeux, par les chemins du monde ! Tourne le char, cocher ; le temps n’est pas venu d’aller dans les jardins fleuris. Comment l’homme sensé, l’homme qui connaît la mort, se réjouirait-il à l’heure de l’angoisse ? »
Mais le cocher continua vers le jardin où le roi