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fantine de jongler avec les mots, qu’à peine le peut-on taxer de procédé. Et même si c’en était un, quel défaut ce feraient pardonner ces élans d’allégresse tendre traversés d’une mélancolie discrète, cette fusion intime du bonheur et de la tristesse de vivre ?

Le ton est le même, avec une nuance plus familière, dans les hymnes à Agni. Il est le dieu terrestre, l’ami de toutes les heures, le protecteur visible du foyer et de la tribu. Pour vivre, d’ailleurs, il a besoin des soins des hommes : il y a, d’eux à lui, un échange continu de bons offices, qui autorise à lui parler presque comme à un égal.

Agni s’est éveillé en face des aurores, resplendissant, prêtre et guide des grands sages : illuminant les lointains, enflammé par les hommes pieux, il a ouvert à deux battants la porte de l’obscurité. — Il a grandi, Agni l’adorable, de par les louanges, de par les vers et les mélodies des chantres ; se plaisant aux mille aspects de l’ordre éternel, il a lui, notre messager, au lever de l’aurore. (Rig-Véda, III, 5, 1-2.)

Indra fait avec lui un frappant contraste : il est la force agissante, la fougue irrésistible, Le guerrier toujours en lutte et toujours triomphant. La plus brillante des nombreuses variations sur ce thème a été trop souvent citée pour qu’on la reproduise ici en entier ; mais l’histoire littéraire serait infidèle qui n’en relèverait pas au moins quelques stances.

Je vais célébrer les exploits d’Indra, les premiers qu’il accomplit, armé du foudre : il a tué Ahi, il a percé la