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un désintéressement sans pareil, et secouru dans tous ses besoins. Il se retirait édifié de la vertu des frères, et confondu des bontés et des attentions dont il avait été l’objet. À la vue de ces beaux exemples, si capables d’adoucir la rudesse des mœurs publiques de cette époque, on se sent grandir, et on est fier d’appartenir à une religion qui produit des actes d’une aussi sublime charité.

Le gouvernement intérieur de l’abbaye était fondé tout entier sur la charité. Les abbés, vraiment dignes de ce nom, étaient comme autant de pères au milieu de leurs enfans. Le chapitre iii de la règle leur défendait même de rien entreprendre sans avoir pris l’avis des frères. Monast. Cist., p. 10.« Toutes les fois, y est auparavant il dit, que quelque chose d’important doit avoir lieu dans le monastère, que l’abbé convoque toute la congrégation, et dise de quoi il s’agit, et qu’après avoir entendu l’avis des frères, il y pense en son particulier, et fasse ce qu’il jugera le plus convenable. Il appellera tous les frères au conseil, parce que Dieu révèle souvent au plus jeune ce qui est le plus avantageux. Que les frères donnent leur avis, en toute soumission, et qu’ils ne se hasardent pas à le défendre avec opiniâtreté. Après cela, que la chose dépende de la volonté de l’abbé, et que tous obéissent à ce qu’il a jugé salutaire. S’il convient au disciple d’obéir au maître, il convient de même à celui-ci de régler toutes choses avec prudence et justice. Que tout le monde suive la règle, et que personne ne s’en écarte témérairement. Que personne ne suive sa volonté propre. Que l’abbé agisse en tout avec la crainte de Dieu et dans l’intention