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nion et reconciliation des cueurs de vos subjects, et pour lever d’entre eulx les deffiances, lesquelles on voit au contraire estre à present plus grandes qu’elles n’ont encores esté, et telles qu’il semble que, sur la fin du dict temps, elles ayent esté expressement accrues, soit par la passion et animosité des hommes, soit par la malice du temps. Encores fraischement Vostre Majesté aura peu entendre ce qui est advenu à Tournon[1], où mon chasteau par le moyen des praticques et intelligences des voisins catholicques, qui se disent estre advouez des grands, a esté surprins, et, par la diligence et affection des habitans de la dicte ville, repris quatre heures aprés. Figeac a esté assailly par deux fois avec assemblée de la noblesse et gens de guerre des provinces de Rouergue, Auvergne, Limosin, Quercy, Albigeois, jusques au nombre de douze à quinze cens, faicte ouvertement et sans dissimulation, et au temps mesme que les lettres patentes de Vostre Majesté en forme d’edict, deffendans si expressement et soubs grandes peines toutes levées et assemblées de gens de guerre sans vostre commission, estoient publiées, de sorte que toutes personnes equitables ont ceste esperance, que la bonté de Vostre Majesté pardonnera tousjours à ses subjects et à leur crainte et soubsçon, si, sur telles occasions et entreprises si ouvertes contre leur propre vie, ils pensent à ce qui est pour leur seureté et conservation, qui est la plus inviolable de toutes les loix. Personne ne doubte, Monseigneur, de la droicte intention de Vostre Majesté, et qu’elle n’apporte, en l’execution de ses edicts et à la cognoissance et repos de ses subjects, toute la sincerité qu’il y convient ; mais on ne peult nier, d’aultre part, que vos ministres, et ceulx mesmes qui ont plus de faveur, credit et auctorité aux provinces, ne procedent pas de mesme pied, et font des effects tous contraires. J’avois naguere faict admettre la ville de Bazas en l’estat porté par l’edict, sans m’arrester à ce que plusieurs aultres choses debvoient estre auparavant effectuées. Incontinent aprés, la

  1. Il ne s’agit point ici de la ville de Tournon, en Vivarais, qui joua un rôle assez important pendant nos guerres de religion, mais de Tournon, en Agénois, aujourd’hui chef-lieu de canton du département de Lot-et-Garonne.