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asseuré qu’il avoit en ce qui me touchoit, et l’envie qu’il avoit de me le faire paroistre en quelque belle occasion. Mais puisque nous ne pouvons deffaire ce que Dieu a ordonné, je vous prie estre l’heritier de ceste affection et fidelité qu’il me portoit, la conjoignant à celle que vous m’avez, comme de mesme je vous donne l’amitié que je luy avois, et la conjoins à celle que je vous porte, qui est telle que vous ne sçauriez desirer meilleure du plus affectionné et asseuré amy que vous aurés jamais. Je suis marry que jusqu’icy je ne vous l’aye peu faire davantaige paroistre, et mesmement en ce traicté de paix où j'ay eu soing de vos affaires aultant que des miens propres, y ayant faict pour vous tout ce qui m’a esté possible, comme le sr de Beauchamp vous dira, et ay esperance que vous en aurez bonne issue. Vous entendrez aussy comme la paix a esté faicte et accordée, les occasions qui m’ont meu et incité à y entendre, et les necessitez qui m’ont comme forcé à l’accepter. Je l’en ay bien au long instruict, et m’en rapporteray à sa suffisance, estant asseuré qu’il les vous representera fidellement. Il ne reste plus que, puisque Dieu nous l’a donnée, que nous la recevions tous et la mettions en execution et la maintenions de tout nostre possible. Je m’asseure que vous y ferez votre debvoir, sçaichant combien vous aimez la concorde ; mais je vous prie y vouloir disposer les cœurs de ceulx de vostre province et les Eglises, à ce que par nostre faulte nous ne retombions aux inconveniens passez. Quand il vous plaira, je seray tousjours tres ayse que vous me veniez voir, comme me le mandez, et m’esforceray de vous ratifier de bouche et avec tout le meilleur recueil qu’il me sera possible, que vous estes l’ung de tous mes parens et amys à qui je veulx faire paroistre aultant d’amitié et bonne affection. Je vous prie pour la fin croire le dict de Beauchamp ; priant Dieu, mon Cousin, vous avoir en sa saincte et digne garde. À Coutras[1], ce iiie decembre 1580.

Vostre bien bon cousin et plus affectionné amy,


HENRY.
  1. Cette petite ville du Bordelais, illustrée, sept ans après, par la bataille qu’y gagna le roi de Navarre, est aujourd’hui du département de la Gironde.