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de Dieu et des hommes, il fault s’employer tous à un si utile et necessaire effect, empescher tous aultres effects contraires au repos commun, et s’opposer d’un commun accord par intelligence, à tous qui tascheront de le rompre en renouvelant les deffiances au milieu de nous, et nous attirant aux miseres passées, sans se laisser desormais circonvenir du pretexte et voile de religion, du service du Roy et bien public, dont ils ont trop souvent accoustumé de se couvrir faulsement. Car la religion se plante au cœur des hommes par la force de la doctrine et persuasion, et se confirme par l’exemple de vie et non par le glaive. Nous sommes tous François et concitoyens d’une mesme patrie : partant il nous fault accorder par raison et doulceur et non par la rigueur et cruaulté qui ne servent qu’à irriter les hommes. Quant au service du Roy mon seigneur, on ne luy en peut faire de meilleur ny plus à propos en ce temps, qu’en establissant en son Royaulme une bonne paix et reünion des cœurs et volontez de ses subjects, au moyen de quoy l’entiere et volontaire obeïssance qui luy est deue luy soit renduë ; laquelle est la fermeté et gloire de sa couronne, qui le rendra reveré de [toutes] gens, estimé de ses amys, voisins et alliez, et redouté de ses ennemys. Joinct que chascun peut voir que tous les grands efforts qu’on a faicts jusques icy par les guerres civiles, avec despence si excessive qu’ils ont espuisé les finances du Roy mon seigneur et de son Royaulme, ensemble toutes les voyes legitimes et illegitimes que l’on a tentées pour exterminer ceulx de la Religion, n’ont apporté aultre effect que de remplir la France de sang, de feu, de cruauté, d’injustice, d’exposer le peuple en proie à la licence et desbordemens de voleurs et pillards, et d’enflammer evidemment de plus en plus l’ire de Dieu contre nous ; de sorte que les plus advisez recognoissent aujourd’huy qu’on ne les peut plus ruiner qu’avec la ruine generale. Et quant au bien public, apres tant de ruines et desolations, il consiste, selon le jugement des plus sages et advisez, au bien d’une longue et durable paix, laquelle seule peut remettre la France en son ancien estat et splendeur, florissante et comblée de biens, richesses et prosperitez.

Prenons donc ceste bonne et necessaire resolution, Messieurs, de