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tingale ; sa voisine était si jolie, si saine et si rose qu’elle semblait faite pour vivre seulement le matin. Et elle riait en se renversant, parce que son compagnon lui chatouillait le nez avec une feuille de platane. Ils nous aperçurent. Aussitôt leur jeu cessa. Ils se prirent bras dessus bras dessous pour passer devant notre banc, en marchant au pas, l’air prodigieusement sérieux ; mais on voyait très bien qu’ils se retenaient de pouffer, ce qui arriva trois pas plus loin juste comme le soleil traversant le feuillage les criblait de taches bleues et dorées.

— Non, reprit M. Canabol, qui caressait sa barbe grise, non, il n’y a pas que l’amour, il y a la jeunesse…

Et il ajouta, la voix changée :

— Lorsqu’on a passé l’âge où les fillettes pendues à votre bras rient des messieurs assis sur les bancs, il faut se résigner aux complaisances et aux mensonges de l’amour réchauffé.