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Entr’ouvrons le brouillard du Nord pour lui demander ses secrets.

Donnez à Oreste, disais-je, la permission d’étendre un peu ses rapports avec le monde extérieur, vous avez Alceste.

J’ajoute : Posez devant Oreste et devant Alceste le problème philosophique, sans le résoudre : vous avez Hamlet.

Oreste, Alceste et Hamlet sont le même homme présenté dans la tragédie, dans la comédie, dans le drame.

La situation d’Hamlet et celle d’Oreste offrent une analogie qui n’aurait dû échapper à personne. Tous deux sont chargés de venger leur père assassiné par leur mère ; tous deux regardent comme un crime de le venger, et comme un crime de ne pas le venger. Tous deux sont poursuivis par des puissances irrésistibles qui leur donnent des ordres auxquels il est également terrible d’obéir et de résister.

En outre, Hamlet ressemble à Alceste par son dégoût des hommes, par l’indécision, par la folie de son amour. Mais ce qui est plaisant chez Alceste est terrible chez Hamlet, parce qu’Hamlet a une âme et qu’Alceste n’en a pas. Alceste n’a qu’un caractère.

Hamlet a une âme : mais cette âme va-t-elle éclater ? Non. Elle est en paralysie. Ce qui paralysait Oreste, c’était la fatalité ; ce qui paralyse Hamlet, c’est le hasard. Le hasard est le nom moderne de la fatalité. Hamlet doute : le doute est l’expression théorique de