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dire : Évite ceci, il faut ajouter : Recherche cela. Mais si la toile tombe sur les lueurs de l’éclair déchirant une nuit sans aurore, le sommeil de votre auditeur sera mauvais ; or vous lui devez un bon sommeil. Vous en êtes chargé, vous le lui avez promis par le contrat tacite qui vous lie l’un à l’autre.

Othello est profond, à certains points de vue, incomplet à certains autres. Comme étude de la jalousie, il est admirable. Mais, pour compléter le sujet, il faudrait dire quel est l’effet de la jalousie. Or l’effet de la jalousie est de séparer la personne à propos de laquelle elle se produit de la personne qui l’éprouve. Desdémona devrait se sentir refroidie vis-à-vis d’Othello. De ce refroidissement naîtraient des sujets de mécontentement qui se compliqueraient par le mélange des sujets imaginaires. Mais le résultat nécessaire de la jalousie étant de tout troubler et de tout séparer, Desdémona devrait sentir et témoigner ce qu’elle ne sent ni ne témoigne. Shakspeare a vu les inconvénients extérieurs de la jalousie. Il n’en a pas vu l’horreur intime. Il n’a pas vu qu’elle est en somme l’application humaine et passionnée de l’envie qui est le caractère propre et le signe même de Satan.

Othello recommande, par la nature de la catastrophe, d’éviter la jalousie. Il en raconte les inconvénients. Pourquoi est-il sans effet ? Parce que la jalousie, qui est combattue par le dénouement du drame, sur le terrain du dénouement, respire en lui et serait plutôt