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LE CHEVALIER BLESSÉ

Je sais une antique légende, une mélancolique et sombre légende. Il était un chevalier, un chevalier blessé d’amour, mais son aimée est infidèle.

Comme elle est infidèle, il faut qu’il la méprise, elle, la bien-aimée de son cœur ! et sa peine d’amour il faut la réprimer ainsi qu’une chose honteuse.

Il voudrait descendre dans la lice et provoquer les chevaliers : « Qu’il se tienne prêt au combat, celui qui accuse ma bien-aimée d’opprobre ! »

Alors tous sûrement garderaient le silence, mais sa douleur, elle, ne se tairait pas : il faudrait donc qu’il tournât sa lance contre son propre cœur souffrant.


14
SUR L’EAU

J’étais debout contre le mât et je comptais toutes les vagues. Adieu, ma belle patrie ! Mon bateau, il vogue vite !

Je passai devant la maison de ma belle bien-aimée ; les vitres des fenêtres étincellent ; je m’use les yeux tant je regarde ; pourtant personne ne me fait signe.

Mes larmes, restez dans mes yeux et n’embrouillez pas mes regards. Cœur malade, ne te brise pas dans ton excessive douleur !


15
LA CHANSON DES REGRETS

Sire Ulrich chevauche dans la forêt verte, au gai bruissement du feuillage. Il voit une figure de jeune fille aux aguets derrière les branches.