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Mais passe chez le marchand cordier et achète-moi une corde ; chevauche lentement et sans rien dire, apporte-la moi.


8
L’ENLÈVEMENT

Je ne pars pas seul, mon doux amour ; il faut que tu viennes avec moi jusqu’à la chère, vieille et triste cellule de la sombre, froide et sinistre maison, où une mère, accroupie sur la porte, guette le retour de son fils.

— « Éloigne-toi de moi homme sinistre ! Qui t’a dit de venir ici ? Ton haleine brûle, ta main est de glace, ton œil étincelle, ta joue est blême. Moi, je veux me réjouir gaiement du parfum des roses et de l’éclat du soleil. »

Laisse le parfum des roses et l’éclat du soleil, ma douce petite aimée ! Couvre tes épaules d’un ample voile blanc, pince les cordes de la lyre sonore et entame un chant nuptial : Le vent nocturne siffle la mélodie.


9
DON RAMIRO

— « Dona Clara ! Dona Clara ! Toi que j’aime depuis tant d’années, tu as résolu ma perte, tu l’as résolue sans pitié.

« Dona Clara ! Dona Clara ! Doux est le présent de la vie ! Tandis que c’est une chose affreuse que la tombe obscure et froide.

« Dona Clara, réjouis-toi ! C’est demain qu’à l’autel, Fernando te prend pour épouse. M’inviteras-tu à la noce ? »

— « Don Ramiro ! Don Ramiro ! Tes paroles me sont amères, plus amères que le verdict des étoiles qui là-haut se jouent de ma volonté.

« Don Ramiro l Don Ramiro ! Secoue ta sombre démence : il y a beaucoup de jeunes filles sur terre, mais Dieu nous a séparés.