Page:Heine - Œuvres de Henri Heine, 1910.djvu/51

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À cette lamentable nouvelle les deux grenadiers, se mirent à pleurer. L’un dit : — « Combien je souffre ! mes vieilles blessures se rouvrent et ma fin s’approche ! »

Et l’autre dit : « Tout est fini ! — Et moi aussi je voudrais bien mourir. Mais j’ai là-bas femme et enfant qui périront sans moi. »

« Que m’importent femme et enfant ! J’ai bien d’autres soucis ! Qu’ils aillent mendier, s’ils ont faim ! — Lui, l’Empereur, l’Empereur est prisonnier !

« Camarade, écoute ma demande : Si je meurs ici, emporte mon corps avec toi, et ensevelis-moi dans la terre de France.

« La croix d’honneur avec son ruban rouge, tu me la placeras sur le cœur ; tu me mettras le fusil à la main, et tu me ceindras l’épée au côté.

« C’est ainsi que je veux rester dans ma tombe comme une sentinelle, et attendre jusqu’au jour où retentira le grondement du canon et le galop des chevaux.

« Alors l’Empereur passera à cheval sur mon tombeau, au bruit des tambours et au cliquetis des sabres ; et moi, je sortirai tout armé du tombeau pour le défendre, lui, l’Empereur, l’Empereur ! »


7
LE MESSAGER


Debout, mon page, et vite en selle ! Puis au galop de ta monture, file par les bois et les plaines jusqu’au château du roi Duncan.

Là, glisse-toi dans l’écurie, et attends jusqu’à ce que le valet te voie. Alors tu lui diras : « Voyons, quelle est celle des filles de Duncan qui va se marier ? »

Et si le valet dit : « C’est la brune » apporte-moi de suite la nouvelle. Mais si le valet dit : « C’est la blonde », inutile de te presser.