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Hallo et houssa ! cris de chasse, claquements des fouets, hennissements des chevaux, aboiements des chiens, sons du cor, rires éclatants, comme tout cela retentissait joyeusement !

À quelque distance devant la troupe, en guise d’avant-garde, d’étranges bêtes fauves, des cerfs et des sangliers, couraient de compagnie ; derrière eux s’élançait la meute.

Les chasseurs étaient de climats différents et de temps plus différents encore : par exemple, à côté de Nemrod d’Assyrie, chevauchait le roi Charles X de France.

J’en reconnus plus d’un dans la bande effroyable. Ce chevalier dont l’armure d’or étincelle, n’était-ce pas le roi Arthus ?

Et Ogier le Danois, ne portait-il pas une brillante cotte de mailles verte qui le faisait ressembler à une grande grenouille des bois ?

Je vis aussi dans les rangs plus d’un héros de la pensée. Je reconnus notre Wolfgang Gœthe à l’éclat de son regard tranquille.

Car, anathématisé par Hengstenberg, le grand païen ne peut reposer dans la tombe, et il continue en société impie à chasser gaiement comme pendant sa vie.

Je reconnus aussi le divin William, je le reconnus au doux sourire de ses lèvres. Les puritains d’Angleterre l’ont aussi damné pour ses péchés.

Il lui faut suivre la bande infernale toute la nuit, monté sur un noir coursier. À ses côtés, sur un âne, trotte un petit homme… Dieu du ciel !…

À sa plate mine de dévot, à son pieux bonnet de coton blanc, à sa frayeur mortelle, je reconnus le piétiste berlinois Franz Horn !

Parce qu’il a écrit cinq volumes de commentaires sur le