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C’est la même lyre sur laquelle il chanta jadis Paisteteros qui aima Basileia, et s’éleva avec elle dans les airs.

J’ai cherché dans le dernier chapitre de mon poème à imiter un peu la fin des Oiseaux, qui sont certainement la meilleure de toutes les pièces de feu mon père.

Les Grenouilles sont aussi parfaites ; on les joue maintenant en allemand sur le théâtre de Berlin, au grand amusement du roi.

Le roi aime la pièce ; cela prouve son bon goût antique. Le vieux roi défunt s’amusait bien plus aux coassements des grenouilles modernes.

Le roi aime la pièce. Cependant si l’auteur était encore en vie, je ne lui conseillerais pas de se rendre en personne à Berlin, pour assister à la représentation de sa comédie.

L’Aristophane en chair et en os passerait un mauvais quart d’heure, le pauvre ami ! Nous le verrions bientôt accompagné de chœurs de gendarmes.

La populace aurait bientôt la permission de l’insulter au lieu de l’applaudir. Sa Majesté le roi ferait empoigner, par ses argousins, le pauvre Aristophane.

Ô roi, je ne te veux pas de mal, je veux te donner seulement un bon conseil. Vénère les poètes morts ; mais aie quelques égards pour ceux qui vivent.

N’offense pas les poètes vivants. Ils ont des flammes et des traits qui sont plus redoutables que la foudre de ce Jupiter qui a été créé lui-même par les poètes.

Offense les dieux anciens et nouveaux, toute la clique de l’Olympe, et le tout puissant Dieu de la Bible par dessus le marché ; mais n’offense pas les poètes.

Les Dieux punissent certes bien durement les méfaits des humains ; le feu de l’enfer est pas mal brûlant, on y droit frire et rôtir.

Pourtant il y a des saints dont les prières délivrent le pécheur.