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Seule là-bas, dans le ruisseau, se baigne la belle ondine. Ses bras blancs et sa croupe gracieuse brillent au clair de la lune.


88

La nuit couvre ces chemins étrangers, — mon cœur est malade, mes membres sont las. Ah ! comme une bénédiction silencieuse, douce lune, ta clarté m’inonde.

Douce lune, avec tes rayons, tu chasses les frayeurs nocturnes. Mes souffrances se dissipent et mes yeux s’emplissent de rosée.


89

La mort, c’est la fraîche nuit ; la vie, le jour étouffant. La nuit tombe ; le sommeil m’a pris ; le jour m’a fatigué.

Au dessus de mon lit est un arbre où chante un jeune rossignol ; il chante l’amour à plein gosier ; je l’entends jusque dans mon rêve.


90

« Où est-elle, dis-moi, la belle bien-aimée que tu chantais si bien naguère, lorsque les flammes magiques embrasaient ton cœur ? »

Ces flammes se sont éteintes, mon cœur est froid et triste, et ce petit livre est l’urne où j’ai mis les cendres de mon amour.



LE CRÉPUSCULE DES DIEUX

Voici le mois de mai avec ses clartés blondes, son soyeux zéphyr et ses violents parfums. Ses blanches fleurs ont un charme délicat, et ses milliers de violettes saluent comme des yeux bleus. Il étend un tapis de verdure diaprée, où l’éclat du soleil joue avec la rosée, et convie les enfants des hommes à venir s’y ébattre. La foule des niais se rend à son premier appel ; les hommes enfilent le pantalon de nankin et la