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77

Moi aussi, dans mes jeunes années, j’ai souffert plus d’une fois d’un mal d’amour amer. Mais au prix où est le bois, le feu finit par s’éteindre, et c’est, ma foi, très bien ainsi.

Réfléchis-y, ma jeune belle ; sèche cette larme bête, chasse ce vain chagrin d’amour. Puisque tu n’en est pas morte, oublie ton amour défunt ; ma foi ! oublie-le dans mes bras.


78

M’es-tu vraiment si ennemie ? Es-tu vraiment toute changée ? Je vais me plaindre au monde entier du traitement que tu m’infliges.

Dites, lèvres sans gratitude, comment pouvez-vous médire de celui qui naguère encore vous baisait avec tant de feu ?


79

Ah ! ce sont bien les mêmes yeux qui me saluaient jadis avec tant de tendresse ; ce sont bien les mêmes lèvres qui me faisaient douce la vie !

C’est bien aussi la même voix que j’aimais tant à entendre ! Moi seul, ne suis plus le même ; je suis revenu tout changé.

Amoureusement enlacé dans ses beaux bras blancs, je repose à présent sur son sein, tout morne et tout abattu.


80

Mes amis, rarement vous m’avez compris ; rarement aussi je vous ai compris moi-même ; c’est seulement quand nous nous rencontrâmes dans la boue qu’il nous fut permis de très bien nous comprendre.


81

Les castrats se plaignaient quand j’élevais la voix ; ils se plaignaient, parce que, disaient-ils, je chantais trop grossièrement.